Bonjour. C’est Maxime Courtoison. Bienvenue sur le podcast “La Dent Bleue, l’histoire des vikings”. Épisode 11 : “ FAQ : Vos questions, mes (longues) réponses ». Ce podcast est un voyage dans le temps pour explorer l’histoire des vikings. Cette émission est chronologique et vous la comprendrez mieux en écoutant les épisodes dans l’ordre, à partir du premier. Nous commençons notre histoire bien avant la période viking, afin de comprendre les mécanismes et événements qui ont fait prendre la mer à des milliers de Scandinaves en soif de richesses et de prestige.
Dans les deux épisodes précédents, je vous proposais un épisode de Foire Aux Questions et vous avez été nombreux à répondre à l’appel ! Et heureusement car sinon, cet épisode n’aurait pas existé ! Nous faisons donc une petite pause dans la narration avant d’y revenir de plus belle avec l’épisode 12.
J’ai réparti les questions en différentes catégories. Nous allons commencer par les questions d’auditeurs souhaitant des précisions sur les épisodes précédents, avec des questions très très pointues. Nous avons ensuite une question sur mes inspirations. Puis on a un gros morceau sur la façon dont je prépare les épisodes, vous m’avez envoyé beaucoup de questions sur le sujet ! On arrive ensuite à une partie qui semble beaucoup vous intéresser : le plan du podcast, de quoi va-t-on parler dans les prochains mois et années. Et les dernières questions concernent… la suite. Pour terminer, je profiterais de cet échange entre nous pour partager un petit peu avec vous mes satisfactions depuis le lancement du projet mais aussi mes petits points négatifs.
Questions précisions sur les épisodes précédents
Commençons par répondre aux questions que les auditeurs m’ont posées pour obtenir des éclaircissements sur les épisodes précédents. Je les ai triées dans l’ordre chronologique des épisodes.
Démarrons avec Bernard, que je cite : « D’après ce que j’en ai compris, la culture Ahrensburg est contemporaine de Bromme, qui en serait la branche nordique. Par ailleurs, Wikipedia place les civilisations Nøsvet (en Norvège) et Lihult (en Suède) en contemporaines des Kongemose puis des Ertebølle danois. Les Ertebølle auraient eux-mêmes des liens étroits avec les Michelsberg, implantés plus au sud. Mais peut-être ai-je mal compris ? »
Merci Bernard, ça commence fort avec ces questions très pointues sur le paléolithique et le mésolithique scandinave, donc ce qui tourne autour des épisodes 2 et 4 de La Dent Bleue, je vais y répondre une par une.
La culture Ahrensburg est-elle contemporaine de la culture Bromme et en est-elle la branche nordique ? Oui, il y a eu une période où ces deux cultures ont cohabité en effet, entre -11 000 et -10 500. La culture Ahrensburg est apparue 500 ans après l’apparition de la culture Bromme, mais elle a perduré 1500 ans après la disparition de cette dernière. Nous avions vu que les chasseurs de rennes de la culture Ahrensburg était plus adaptés au refroidissement climatique de l’époque que les chasseurs-cueilleurs de la culture Bromme dont l’économie était basée sur un climat forestier un peu plus tempéré.
La culture Ahrensburg est située un peu plus au Nord (tout en restant dans le tiers sud de la Scandinavie), oui, mais elle ne semble pas originaire de la culture Bromme. La culture Ahrensburg du paléolithique se serait ensuite transformée en la culture Kongemose du mésolithique, je cite les arguments pour ce point dans l’épisode 4 « Pêcheur-cueilleur scandinave : une bonne situation ? »
Bernard demandait ensuite si les civilisations Nøsvet (en Norvège) et Lihult (en Suède) étaient contemporaines des Kongemose puis des Ertebølle danois. Oui c’est tout à fait ça. J’ai volontairement choisi de ne pas parler de ces cultures matérielles que sont Nøsvet, Lihult et d’autres encore. Il existe un très grand nombre de cultures matérielles différentes et j’essaie d’en donner le minimum pour que vous puissiez suivre la narration et vous attacher un petit peu à ces populations. Voilà, pour ceux qui trouvent que je donne beaucoup de noms de culture, dites-vous qu’en réalité, il y en a beaucoup plus !
Enfin, la dernière question concernait le lien étroit qu’il y aurait entre les Ertebølle et les Michelsberg, implantés plus au sud. Alors je n’ai pas vraiment trouvé de lien si étroit entre les deux cultures. La culture Michelsberg est une des cultures de l’ensemble néolithique d’Europe Centrale appelé « culture rubanée ». Ces deux cultures (Ertebølle et Michelsberg) sont voisines et contemporaines sur la période autour de -4400 à -4000. Les porteurs de ces cultures ont pu avoir des liens commerciaux entre eux et on a des traces d’échanges entre les chasseurs-pêcheurs-cueilleurs Ertebølle et leurs voisins agriculteurs de la culture rubanée. Et ethniquement, elles étaient très différentes : la génétique nous apprend que les Ertebølle sont issus des chasseurs-cueilleurs occidentaux originaires du refuge Italie-Balkans lors du dernier maximum glaciaire, tandis que les fermiers de la culture rubanée sont issus à environ 75% des fermiers d’Anatolie (et à 25% des chasseurs-cueilleurs d’Europe centrale).
Continuons avec une question de Quentin: « Pour le prochain épisode FAQ j’aimerais bien que tu traites une petite précision concernant l’introduction de l’agriculture en Scandinavie. Tu as déjà bien abordé le sujet et au vu des données avancées je constate que celle-ci s’est bornée à l’extrémité sud de la péninsule, principalement en Suède. Est-ce à dire que le peuplement de la Scandinavie à cette époque se résume principalement à cette zone ? Ou que le reste du territoire est tout de même peuplé (les littoraux notamment) mais n’a pas effectué cette transition néolithique ? »
Merci Quentin. Je vais commencer par rappeler que, comme on l’a vu dans l’épisode 5 « Une invasion de fermiers en Europe ? », la génétique a clôt le débat sur l’origine de l’agriculture en Europe : l’agriculture en Europe et donc en Scandinavie est arrivée de pair avec une migration humaine de fermier originaires d’Anatolie. En Scandinavie, il s’agit de la culture des vases à entonnoir.
Donc, à partir de -3 900, tout le tiers sud est passé à l’économie néolithique. C’est-à-dire si on prend les frontières actuelles : le Danemark, le sud de la Suède et un bout de la Norvège autour du fjord d’Oslo. Puis à partir de -3 500, on est sur une très très grande proportion d’alimentation provenant de l’agriculture. On passe de 30% à 90%. Ça c’est pour les fermiers scandinaves, qui sont arrivés sur le territoire depuis l’Europe Centrale et dont les lointains ancêtres viennent d’Anatolie. Mais dans les 2/3 nord, la Scandinavie est occupée par des chasseurs-pêcheurs-cueilleurs qui vivent d’une économie mésolithique. Ceux-ci ont une origine différente des fermiers, un mélange de chasseurs-cueilleurs occidentaux et orientaux présents en Europe lors du dernier maximum glaciaire. La population est plus dense sur les littoraux, mais certains groupes vivent dans les terres. Plus tard, des éléments néolithiques/âge du bronze arriveront plus au nord avec l’arrivée des Indo-Européens, mais ça, c’est pour les prochains épisodes 🙂
Nous avons ensuite une nouvelle question de Quentin : « D’après tes recherches et au regard de la néolithisation de l’Europe à cette période et même plus tôt, considères-tu que ce phénomène a « bien pris » en Scandinavie ou qu’au contraire il est resté assez secondaire comparé à la pêche-chasse-cueillette ? »
Commençons par distinguer le tiers sud de la Scandinavie des 2/3 nord. Pour la partie nord, le néolithique va commencer bien plus tard et nous n’y sommes pas encore dans la chronologie. Pour la partie sud, le processus de néolithisation par la culture des vases à entonnoir s’est fait en plusieurs étapes. Dès -3 900, ils dominent le territoire au détriment des chasseurs-pêcheurs-cueilleurs mésolithique, mais les produits agricoles restent minoritaires dans leur alimentation, ne représentant que 30% de celle-ci. Les immigrés ont dû s’adapter aux conditions locales : ils étaient à la fois fermiers et également chasseurs, pêcheurs et cueilleurs. Mais malgré tout, on est complètement sur un mode de vie néolithique, caractérisé aussi par la construction de tumulus, la déforestation, les haches en pierre polies, etc.
Ce n’est qu’à partir de -3 500 que la néolithisation accélère vraiment en Scandinavie avec une augmentation de la taille des maisons, des champs et de la proportion de produits de la ferme dans le régime alimentaire, jusqu’à atteindre 90%.
Comme dans le reste de l’Europe, le mode de vie néolithique a bien pris dans le sens où les populations de fermiers issus d’ancêtres d’Anatolie ont remplacé les populations locales de chasseurs-cueilleurs. Ils ont alors installé leur économie et leur mode de vie. En une centaine d’années, les traces génétiques des chasseurs-cueilleurs du mésolithique ont quasi disparues du sud de la Scandinavie. Mais ce qui a moins bien pris, c’est l’agriculture en tant que telle, probablement du fait de conditions climatiques plus difficiles. C’est ce qui avait causé, 1500 ans plus tôt, un ralentissement généralisé de la migration vers le Nord de ces fermiers.
Maintenant une question de Xavier : « Dans l’épisode 8, comment sait-on le moment à partir duquel on a commencé à domestiquer le mouton ? Pourquoi c’est -4000 et pas avant. Et c’est quoi cette histoire de laine, d’où ça vient cette histoire que la laine arrive après ? »
Merci Xavier pour cette question très pointue. Dans l’épisode 8, un des arguments pour dater la première séparation des langues indo-européennes et donc la diffusion du proto-indo-européen est une histoire de laine. J’expliquais que bien que les moutons aient été domestiqués depuis -7 000, ils n’ont commencé à produire de la laine que vers -4 500. Ce qui signifiait que cette séparation des langues et donc a priori des peuples indo-européens avait commencé au plus tôt en -4 500.
Mais revenons à la question. Comment sait-on la période à partir de laquelle on a commencé à domestiquer le mouton ? Dans l’épisode, je disais -7000, mais en réalité, j’aurais dû dire au moins -7000. (Olander, 2019, p. 20) Entre -9 000 et -7 000 d’après les spécialistes. (Barber, 1991, p. 22) Une fourchette de 2000 ans, ce n’est pas vraiment très précis. C’est que ce n’est pas si simple de dater quand un animal passe de sauvage à domestique. En particulier pour les moutons.
Les preuves sont dans les restes d’animaux, les os. Et il faut avoir en tête que les os de moutons sont très proches de ceux de leurs cousines les chèvres, qui ont été domestiquées dans les mêmes périodes. C’est une grande difficulté dans l’étude du sujet. (Barber, 1991, p. 22) Malgré tout, les archéozoologues identifient des moutons domestiques avec plusieurs critères. Il y a par exemple la morphologie osseuse, avec une taille au garot plus petite et des cornes moins développées que les moutons sauvages. Cela a pu être dû à un processus de sélection humain qui a éliminé les mâles les plus grands et potentiellement difficiles à gérer. Un autre critère est l’âge des moutons abattus : quand on retrouve une majorité de jeunes mâles et de femelles adultes, cela indique une gestion humaine du troupeau, avec des jeunes mâles que l’on abat pour la viande et des femelles adultes que l’on garde pour la reproduction et les produits laitiers. (Helmer, 1992, p. 90‑93) Grâce à ces critères, on est capable de dater les débuts de la domestication du mouton entre -9 000 et -7 000 entre l’Anatolie et l’actuel Iran. (Anthony, 2007, p. 60)
Maintenant pour la question suivante : pourquoi la laine arrive-t-elle après ?
En fait, les premiers moutons n’avaient pas de laine, mais plutôt des gros poils, un peu comme les mouflons. C’est par la sélection humaine des moutons les plus poilus que l’on est arrivé aux moutons modernes aussi laineux. (Anthony, 2007, p. 59; Olander, 2019, p. 20) Parmi les preuves de l’apparition de laine, on retrouve notamment des outils pour travailler la laine.
Une nouvelle question de Xavier maintenant : « Épisode 9 dans la même veine. Pourquoi dis-tu que les Yamnayas mangeaient des chevaux ? Est-ce qu’ils ne les avaient pas plutôt domestiqués ? Pourquoi ce n’était qu’une source de protéine à ce stade ? »
Dans l’épisode 9, on parle des cultures Dniepr-Donets et Sredni Stog, qui sont les cultures des ancêtres des Yamnayas. Dans les lieux d’habitation de ces populations, on a retrouvé des os de chevaux en grande quantité, à côté d’os d’autres animaux. On sait donc que les chevaux faisaient partie du régime alimentaire.
Cette question m’a été envoyée avant la sortie de l’épisode 10 qui traite en longueur la question de la domestication du cheval, donc je ne vais pas refaire tout l’argumentaire : si vous êtes arrivés ici et que vous suivez dans l’ordre, vous l’avez déjà entendu. Sinon je vous renvoie vers l’épisode précédent à partir de 4 minutes.
Mais résumons quand même rapidement pour ce qui est de la domestication du cheval, le fait de maîtriser des troupeaux de cet animal. Pour rappel, voici l’enchaînement de culture à l’ouest de la steppe pontique : les éleveurs Dniepr-Donets à partir de -5 200 ; puis la culture Sredni Stog à partir de -4 400 issue d’un mélange entre les Dniepr-Donets et des éleveurs du centre de la steppe pontique ; puis la culture Yamnaya à partir de -3 300, qui est une variante culturelle des Sredni Stog amenée à dominer le reste de la steppe et une grande partie de l’Eurasie. Les archéologues datent la domestication du cheval à la culture Sredni Stog. David Anthony amène des preuves d’une domestication du cheval dès la culture Dniepr-Donets mais celles-ci ne sont pas définitives et ne font pas consensus.
Maintenant pour ce qui est de l’équitation, le fait de monter à cheval, il semblerait qu’elle n’ait pas été pratiquée par les Yamnayas ni par leurs ancêtres. Il y a des arguments qui vont dans le sens de cette pratique de l’équitation par ces populations, mais ils ne font pas consensus et je vous renvoie encore à l’épisode 10.
Questions sur mes inspirations
Nous arrivons à une question de Bernard sur mes inspirations : « Je constate que nous avons le même intérêt pour la recherche des racines scandinaves. Est-ce le goût pour des peuples pas du tout aussi primitifs qu’on le prétend, et qui vivaient à une époque où l’homme n’avait encore laissé qu’une légère empreinte sur la planète ? »
Merci Bernard pour cette question. Le paléolithique supérieur, là où commence l’histoire humaine en Scandinavie est une période fascinante et je ne peux m’empêcher d’essayer d’imaginer la vie des habitants de cette époque, qui étaient si peu nombreux sur un territoire inconnu aussi immense et pris en grande partie par les glaces.
Mais ce n’est qu’assez récemment que j’ai découvert cette période. Mon intérêt premier en lançant le podcast était et est toujours la période viking. Je pense que ce qui me fascine chez eux, c’était ce goût du risque, de l’inconnu et de la liberté. Un sentiment que tout est possible. Dans une époque où des nations puissantes commençaient à structurer leur pouvoir, on a des sortes d’entrepreneurs scandinaves qui débarquent et se lancent dans des entreprises de pillage puis de colonisation de plus en plus conséquentes. Leurs entreprises font chanceler des états en théorie beaucoup plus puissants. Au début, j’ai trouvé ça fascinant, mais aussi incroyable de se lancer dans des opérations aussi risquées. Puis lorsque l’on découvre la culture de la Scandinavie à cette période, on comprend mieux ce qui a poussé ces fermiers à partir en expédition viking.
Puis pour comprendre ce qui a créé cette culture, il m’a fallu remonter dans le passé, et encore, et encore… Et c’est comme ça que je me suis retrouvé petit à petit dans la préhistoire. Une période que je ne connaissais pas particulièrement il y a quelques années, mais que je trouve aujourd’hui vraiment passionnante. Lorsque l’on pense préhistoire, on peut avoir tendance à penser « Homme des cavernes ». Mais la préhistoire est extrêmement vaste, cela va de l’origine de l’humanité jusqu’à l’âge du fer. Si au début de la préhistoire, le mode de vie ne devait pas être si loin de celui des autres primates, à la fin, on se retrouve avec des sociétés structurées, avec des cultes complexes, des échanges commerciaux terrestres et maritimes, de l’artisanat de qualité, la réalisation de structures monumentales nécessitant une grande organisation… Bref, tout ce que l’on a vu dans nos épisodes de La Dent Bleue, et qui, je l’espère, vous aura intéressé autant que moi !
Questions sur la préparation des épisodes
Passons maintenant aux questions sur la préparation des épisodes. Nous allons commencer par une question de Kurtis Koban : « Si je comprends bien, tu avais l’idée de départ mais pour chaque nouvel épisode tu fais tes recherches/lectures à ce moment ou tu avais déjà toutes les bases et tu « peaufines » ? »
Pour répondre à cette question, je vais vous expliquer mon processus de recherche. En 2020, quand j’ai eu l’envie de me lancer dans le projet de la vulgarisation historique par ce podcast, je ne connaissais quasiment rien à l’histoire de la Scandinavie et des vikings. Bien qu’amateur d’Histoire et de Scandinavie, je ne m’étais pas encore renseigné dessus. J’ai alors commencé à lire, puis à lire, puis à lire. Des livres d’Histoire, en français, en anglais, les sagas, les Eddas. Il fallait que j’acquiert une base suffisamment solide pour avoir une idée globale de l’Histoire de la période viking, de la culture scandinave de l’époque, de ses mythes et légendes.
Ça m’a pris 3 ans pendant lesquels j’ai dressé le plan global du podcast. Et j’ai décidé de commencé par le commencement. Je ne souhaitais pas démarrer le podcast à la fameuse année 793 et le pillage de Lindisfarne que je mentionne au début de l’épisode d’introduction. C’est épique certes, mais contrairement à ce dont on peut avoir l’impression dans nos programmes d’Histoire qui sont forcément très concis, la période viking ne sort pas de nulle part. Dans ma vision du podcast, il fallait absolument que je commence par le tout début. Par les premiers humains qui ont mis les pieds sur le territoire. Puis je voulais évoquer les bouleversements migratoires et culturels qui ont amené ce territoire reculé à devenir les croquemitaines de l’Europe, laissant un souvenir impérissable jusqu’à aujourd’hui. Cette période me fascine et d’après moi, elle est complètement méconnue, contrairement à la période viking, qui a déjà une certaine popularité.
Mais ce choix a rendu ma phase de recherche initiale encore plus longue et j’ai passé encore un an à travailler sur la préhistoire scandinave. Car les livres d’Histoire sur la période viking mentionnent rarement ce qui se passe avant. Et quand c’est le cas, par exemple pour « Les vikings » de Régis Boyer, « A History of the Vikings » de Gwyn Jones ou « The Viking World » édité par Stefan Brink et Neil Price, on a juste un chapitre, quelques paragraphes qui passent très vite. Des millénaires d’Histoire et de changements culturels, linguistiques et génétiques passent en quelques paragraphes. Et ça se comprend, ces livres racontent l’histoire des vikings. Ils donnent juste un peu de contexte sur les périodes antérieures, puis passent au cœur du sujet.
Mais personnellement, je n’étais pas rassasié par ce que j’ai trouvé dans ces livres sur la période viking, donc j’en ai lu d’autres comme « The Cambridge History of Scandinavia édité par Knut Helle. Dans chaque chapitre de cet ouvrage collectif, un expert détaille l’histoire de la Scandinavie. De nombreux sujets sont évoqués : de la géologie scandinave à l’unification des trois royaumes, en passant par l’âge du bronze, la linguistique, la christianisation… Mais chaque chapitre passait encore une fois trop vite à mon goût. Seulement 17 pages sur l’âge de pierre plus l’âge du bronze, on reste sur de la synthèse. Donc j’ai voulu avoir encore plus de détails sur cette préhistoire scandinave.
C’est là que je suis tombé sur le superbe ouvrage de Thomas Douglas Price : « Ancient Scandinavia : an archeological history from the first humans to the Vikings » (« La Scandinavie ancienne : une Histoire archéologique des premiers humains aux vikings »). Ce livre d’archéologie a eu un impact majeur sur moi et sur le projet de La Dent Bleue. Là, on rentre enfin dans les détails : des résumés de rapports de fouilles, des hypothèses, des arguments, des cultures matérielles. Des chapitres de 40 pages sur le mésolithique scandinave. Là on est pas mal.
Pour reprendre la question initiale : j’ai une idée de départ très claire sur ce que je veux faire avec La Dent Bleue. Raconter chronologiquement l’histoire de la Scandinavie des premiers peuplements humains à la fin de la période viking. Et cette histoire chronologique, je veux l’alterner avec le récit de la mythologie nordique et des sagas. Des récits qui seront mis dans le contexte, dont on cherchera les sources, et étudierons ce que l’on peut en tirer en tant que source historique ou encore comme source pour comprendre le cadre de référence de celles et ceux qui les ont créés. Comme pour l’épisode sur la création du monde nordique et son lien possible avec la fonte des glaces. Et surtout, je veux que l’on parle de la culture de ces peuples, comme on le fait en ce moment avec les Yamnayas. C’est pour moi un des aspects les plus importants de l’Histoire. Car sans comprendre qui étaient ces personnes, comment elles vivaient, se nourrissaient, se déplaçaient, commerçaient… Comment leurs sociétés étaient structurées, hiérarchisées… Sans ça, ce ne sont que des noms de cultures puis plus tard de personnes qui sont pris dans des événements. Comprendre en détail la culture de ces populations permet de comprendre quelles pouvaient être leurs motivations, leurs buts, leurs craintes. Bref, de s’immerger un peu dans ces événements, dans ces petits et grands bouleversements, un peu comme si on les vivait. C’est l’objectif en tout cas !
J’ai donc des bases sur l’histoire et la préhistoire de la Scandinavie, qui me permettent d’avoir un plan global du podcast, avec l’ordre des sujets que je veux évoquer, dont le fil rouge est tout simplement l’histoire de la Scandinavie. Quand je me mets à travailler sur un épisode, je commence par relire toutes mes notes sur le sujet. À partir de ces notes, j’écris un plan avec les différentes parties et sous-parties. D’ailleurs, merci aux cours de français, d’Histoire-Géo et de philo du lycée pour toutes ces heures de rédaction de dissertation.
En rédigeant ce plan, je note tous les sujets que je veux évoquer et où trouver mes sources. À ce stade, j’ai encore énormément de questions sans réponse, de sources manquantes ou de sources que je souhaite croiser. Même les livres références ne répondent pas à toutes mes questions. La curiosité et le sens critique me poussent à aller plus loin et à continuer les recherches. Ça peut être des détails que je ne comprends pas bien, ou un raisonnement dont je ne partage pas forcément la logique. Ou tout simplement des sujets qui ne sont pas évoqués dans les sources que j’ai lues mais que je pense intéressants à découvrir et partager. Et il y a également le souhait de croiser les sources ou de vérifier si les conclusions sont toujours valables. J’ai plusieurs livres qui ont une dizaine d’années par exemple. Ça reste assez récent, mais la recherche historique ne s’est pas arrêtée là et en dix ans, elle a énormément progressé, notamment sur la préhistoire. De nouvelles découvertes et fouilles permettent d’affiner l’interprétation des archéologues et la génétique, dont j’ai parlé à de nombreuses reprises, est une véritable révolution dans notre compréhension du passé. Pour être à la pointe de la recherche historique, je lis les publications scientifiques publiées dans des revues de grande qualité comme Nature ou Science. Et c’est comme ça que je me retrouve avec 164 documents dans ma bibliographie à l’heure actuelle.
La phase de recherche se termine alors quand j’ai mis des sources pour chacune des sous-parties de mon plan. Et vient alors la phase d’écriture lors de laquelle j’essaie de digérer tout ça pour vous fournir un récit que j’espère aussi divertissant qu’instructif.
Voilà, donc merci pour ta question Kurtis : pour chaque épisode, j’ai une idée de départ, quelques connaissances de base, mais c’est surtout beaucoup de recherche pour rentrer dans le niveau de détail que je souhaite atteindre dans mon récit.
Nous passons maintenant à une question de Valentin : « Combien de temps mets-tu pour préparer un épisode ? »
En général, je sors un épisode tous les mois, ou plutôt mois et demi. Maintenant combien de temps j’y passe ? Ça varie beaucoup selon le temps de recherche. Par exemple, pour la série d’épisodes sur les Yamnayas, j’ai passé des dizaines et des dizaines d’heures de recherche avant d’écrire quoi que ce soit. Et ce travail de recherche me sert pour toute la série d’épisode. Mais je vais essayer de donner une moyenne.
Sans compter tout le travail préalable de ces dernières années pour acquérir les connaissances historiques de base, le travail de recherche spécifique sur un épisode me prend au moins 30 heures. À partir de là, j’ai toutes mes notes et le matériel pour écrire.
La phase d’écriture dure une vingtaine d’heures, avec souvent des allers-retours pour continuer les recherches quand me vient l’idée d’ajouter une précision que je n’avais pas dans mes sources initiales. Je ne suis clairement pas très rapide sur l’écriture, ça me demande toujours beaucoup de concentration et j’ai besoin de faire des pauses.
Puis c’est l’enregistrement. Pour ça, je pense être assez efficace maintenant, je mets entre une heure et une heure et demie pour enregistrer un épisode d’une trentaine de minutes. Je fais de moins en moins d’erreur d’élocution et lorsque c’est le cas, j’édite directement pour gagner du temps en post-production.
Vient donc le moment de la post-production et du montage, qui me prennent 3-4H. C’est là que j’améliore le rendu sonore et que j’ajoute les musiques et effets sonores qui, j’espère, donne un peu plus de piment à l’épisode.
Et pour terminer, il y a tout le travail de publication et diffusion de l’épisode qui comprend l’écriture de la description, la réalisation de la pochette, l’écriture du petit quiz de l’épisode, la publication du script avec toutes ses sources sur le site ladentbleue.fr. Cette dernière étape me prend du temps et en soi, ne serait pas forcément obligatoire. Mais je me suis imposé de citer mes sources dans le script, de façon aussi précise que si vous lisiez une publication scientifique. C’est le contrat moral du podcast entre vous et moi et c’est la garantie de la fiabilité et surtout de la vérifiabilité des sources de toutes les informations citées dans le podcast. Puis vient la diffusion de l’épisode sur l’hébergeur, la publication des sous-titres sur Youtube, la création de clips vidéo pour teaser l’épisode sur les réseaux sociaux, la programmation de plusieurs posts sur les réseaux pour diffuser des cartes et des images intéressantes sur l’épisode, etc. Cette phase de publication et diffusion me prend plus de cinq heures en général.
Donc en tout, ça fait une soixantaine d’heures par épisode environ ! Donc si j’étais à plein temps, je pourrais vous sortir trois épisodes par mois, mais comme ce n’est pas le cas, il faut être un peu plus patient !
Passons à une question de Dunalk : « Comment arrives-tu à conjuguer ton boulot, ta vie de famille, tes loisirs et le podcast ? »
Eh bien ce n’est pas simple du tout ! Surtout que j’ai changé de travail depuis le lancement du podcast, j’ai repris un travail d’ingénieur. Le métier est passionnant, mais je travaille beaucoup plus d’heures qu’avant. Donc globalement, pas simple de tout conjuguer, mais je dirais que mes astuces pour moi-même c’est : ne pas zoner sur le téléphone et ne jamais s’assoir !
Nous avons une nouvelle question de Valentin : « Qu’est ce qui te passionne le plus dans la préparation et l’écriture du podcast ? »
Dans la phase de recherche, j’ai souvent l’impression de retourner petit à petit des pièces d’un vaste puzzle. Je ne sais pas toujours jusqu’où ça va, mais je découvre toujours de nouvelles pièces. Le motif prend alors de l’épaisseur, mais je n’arrive pas toujours à bien le distinguer. Puis petit à petit, je rassemble des pièces ensembles, pour faire des morceaux complets de motif. Et alors, le moment où je suis le plus à fond, c’est quand je réussis à trouver la pièce manquante qui permet de rassembler tout un motif ou plusieurs motifs ensemble. Quand je réussis à croiser les informations et les sources et à comprendre cette histoire. Donc ces moments-là de ma phase de recherche sont vraiment passionnants.
Et pour l’écriture, j’aime beaucoup préparer mon plan d’épisode. Déterminer dans quel ordre je vais raconter les différentes parties pour que ça soit à la fois didactique et narratif. Et évidemment, tout le travail d’écriture en général. Avec quelques moments où je suis vraiment dans la « Zone » et où le texte sort tout seul. Alors que parfois, il y a des moments plus difficiles dans l’écriture, où il faut que je teste trois-quatre formulation avant de trouver la bonne phrase.
Questions sur le plan du podcast
Passons maintenant aux questions sur le plan du podcast, à commencer par celle de Valentin : « Quelle est ta vision pour le podcast à court, moyen et long terme ? »
À court terme, l’idée est de terminer la série d’épisodes sur les Yamnayas. Le prochain épisode sera la suite de l’épisode 10. Nous terminerons notre immersion dans la culture de ces éleveurs des steppes, une culture qui s’apprête à bouleverser l’Europe. L’arrivée des Indo-Européens est l’ultime grand mouvement de population à atteindre le sud de la Scandinavie avant la période viking. Et certaines des caractéristiques de la société scandinave de la période viking sont issues de ces Proto-Indo-Européens. Tout comme de nombreux mythes nordiques. Et ce sera le sujet des épisodes qui suivront : la diffusion des Indo-Européens, de la steppe pontique à la Scandinavie, en passant par l’Europe Centrale ; puis la cohabitation entre les nouveaux arrivants – les éleveurs indo-européens donc – et les anciens. Vous vous rappelez des anciens ? Au moment de l’arrive des Indo-Européens, nous avons deux cultures bien distinctes dans le tiers sud de la Scandinavie : les fermiers de la culture des vases à entonnoir et les pêcheurs-cueilleurs de la culture de la céramique perforée. Ça va chauffer ! Il y aura aussi un épisode ou une série d’épisodes sur la mythologie nordique dans lesquels nous nous immergerons dans l’origine des dieux et dans la guerre entre deux familles de dieux, les Ases et les Vanes. Quand nous arriverons à cet épisode, vous vous serez fait une bonne idée des affrontements qui ont opposés les Indo-Européens aux autres populations. Et on aura parlé des guerres entre familles de dieux. On se posera alors ensemble la question suivante : ces mythes sont-ils le reflet d’événements historiques ? Je ne vous en dis pas plus, mais j’espère que vous avez aussi hâte que moi d’arriver à cette partie.
Voilà pour le court terme et les prochains épisodes.
À moyen terme maintenant. Dans ce qui suivra, plus de gros changements de population (tout du moins dans le Sud), mais de nombreux changements culturels, en partie influencés par de puissants voisins. Nous décrirons l’évolution de la société scandinave de l’âge du bronze nordique, puis de l’âge du fer celtique et enfin de l’âge du fer romain. Il est possible que chacune de ces périodes ne fasse l’objet que d’un seul épisode, afin que l’on arrive rapidement à un gros gros morceau : l’âge du fer germanique et les grandes migrations, aussi appelée « Grandes Invasions ». Cette période a une importance capitale dans l’histoire européenne et en particulier bien sûr dans l’histoire de la Scandinavie, qui sont les germains du Nord. Nous arriverons alors dans la période où se déroulent les mythes germaniques les plus anciens qui nous sont ensuite parvenus dans des poèmes et des sagas. L’histoire de Sigurd qui a inspiré Wagner et Tolkien, la légende de Beowulf ou la saga de Hrolfr Kraki.
Et pour le plan à long terme, j’ai expliqué dans la question précédente donc je ne vais pas aller plus dans le détail, l’idée est de balayer toute la période viking. Voilà le plan !
Nous continuons avec une question d’Alexis : « À partir de quel épisode tu penses commencer à entrer dans la période « vikings » au sens large, c’est à dire celle de l’imaginaire collectif ? »
Cette question est très compliquée à répondre pour moi. Car si j’ai un plan précis sur tout le projet, il m’arrive bien souvent de découper mes épisodes en plusieurs. Par exemple, sur l’arrivée des premiers fermiers en Scandinavie, je ne comptais initialement faire qu’un seul épisode, mais du fait de la quantité de sujets passionnants que je voulais vous partager, j’ai été obligé de découper en deux : l’épisode 5 « Une invasion de fermiers en Europe ? » traitant de l’apparition de l’agriculture, du débat diffusion culturelle ou migratoire de l’agriculture et de l’arrivée des fermiers entre -4 000 et -3 500 ; puis l’épisode 6 « Neolithic Start-Up Nation » dans lequel nous évoquons le fort développement de la culture des vases à entonnoir qui prend la pleine mesure du mode de vie agricole, et également tout le côté rituel et violence. Pour la diffusion des Indo-Européeens, c’est pareil, dans le plan c’était un ou deux épisodes, mais finalement, ça devrait être cinq épisodes.
Au fur et à mesure de mes recherches, l’histoire que je veux raconter s’épaissit et les sujets se divisent en plusieurs épisodes. Mais malgré tout, je vais essayer de répondre à ta question. Pour le côté mythologie nordique qui était une composante du mode de pensée des Scandinaves de la période viking, on va avoir des épisodes au fil de l’eau, à des moments pertinents. Par exemple, on a parlé dans l’épisode 3 « Glace, feu, géants : la création du monde nordique » de la cosmogonie de cette mythologie, après avoir raconté comment le territoire a été initialement colonisé. Maintenant, pour ce qui est de la période viking ou pré-viking, on va dire la deuxième partie du VIIIème siècle, je pense y arriver autour de l’épisode 30 ! Donc dans un petit bout de temps ! Mais pour les amateurs de raids, de combats et de sagas épiques, vous n’aurez pas besoin d’attendre aussi longtemps, ne vous inquiétez pas !
Passons à une question de Kurtis Koban : « Quand tu vas arriver sur la période « viking » vas-tu rester principalement cantonné à la Scandinavie ou vas-tu aussi mettre en avant les « colonies » assez peu connues comme en Irlande qui est pourtant très riche d’un mix culturel assez incroyable ? 😋 »
On va voir les deux : la Scandinavie et le reste. En Scandinavie, l’idée est de raconter l’histoire de celles et ceux qui y ont habités. L’histoire des puissants : les rois, les chefs vikings. Et aussi l’histoire des masses : les paysans, les esclaves. Découvrir pour toutes ces strates de la population, ce qu’était leur mode de vie, leurs coutumes. Mais nous verrons aussi l’histoire des vikings et colons scandinaves sur toute leur aire d’expansion. Comme je le disais dans l’épisode d’introduction, ce podcast est un voyage dans le temps, mais aussi dans l’espace et nos limites géographiques sont celles des vikings. Nous nous attarderons sur les territoires où les Scandinaves s’installeront durablement : la Normandie, l’Islande, la Russie, les îles britanniques, et nous voyagerons et explorerons avec eux jusqu’au Canada, la mer blanche, Bagdad… Au fur et à mesure que nos Scandinaves entreront en contact avec d’autres populations, nous découvrirons l’histoire et la culture de ces peuples. Cela permettra de contextualiser et de comprendre pourquoi les Francs, les Celtes, les Anglo-Saxons, les Slaves ont réagi de telle ou telle manière à l’apparition des Scandinaves sur leur territoire. Et inversement, cela nous permettra aussi de mieux comprendre les vikings et les changements en Scandinavie qui s’inscrivent dans un contexte international.
Pour ce qui est de l’Irlande, j’ai vraiment hâte d’arriver dans ce théâtre d’une grande partie de notre action lors de la première phase viking !
Nous avons ensuite une nouvelle question de Kurtis Coban : « Est-ce que tu termineras ton podcast fin 11ème ? »
Oui, c’est l’idée ! Je voudrais vraiment aller jusqu’au bout du phénomène viking. Ce phénomène a beaucoup changé entre les raids des débuts et les invasions organisées de la fin, et je trouve que tous ces aspects sont passionnants. Donc pour aller au bout, ça sera en effet à la fin du 11ème siècle. Comme je l’expliquais dans le premier épisode, même si la date qui marque « officiellement » la fin de la période viking est 1066, il y a eu des raids typiquement vikings dans les années qui ont suivies. Je pense aller jusqu’à ces derniers raids avant de fermer la boutique. Mais j’en suis encore loin !
Questions sur la suite
En parlant de la fin du podcast, j’ai reçu quelques questions sur les projets pour la suite.
À commencer par @RICHARD-TETE-DE-FION, magnifique pseudo, qui demande : « Envisagez-vous de produire d’autres épisodes, peut-être sur d’autres thématiques historiques ? »
Eh bien en fait, j’aurais envie oui. Mais, soyons réalistes, vue l’ampleur du projet que j’ai lancé, de tout ce que j’ai envie de raconter et de mon rythme de sortie d’épisodes, je pense que c’est quasiment le projet d’une vie. Là, en termes de durée, vous vous êtes plutôt embarqués sur Les feux de l’amour que sur une mini-série. [Musique des feux de l’amour] Donc oui, j’ai vraiment envie de focaliser sur le sujet des vikings au sens large. Le sujet est inépuisable. Il y a beaucoup plus de risque que ça soit moi qui m’épuise, ce que je n’espère pas, plutôt que ce soit le sujet qui s’épuise.
Maintenant, si j’arrête un moment d’être réaliste, j’adorerais raconter l’histoire des Huns, avec en point d’orgue celle d’Attila. Je suis fasciné par ce personnage. J’aimerais beaucoup continuer ensuite sur les bouleversements qui suivent cette période : la déliquescence de l’empire romain, les grandes migrations, les royaumes barbares. Je passe un appel en tout cas, comme je n’aurais jamais le temps de créer un podcast sur le sujet, si ça crée une vocation chez l’un d’entre vous, je serais parmi les premiers auditeurs !
Et nous terminons par une question du fidèle Kurtis Koban : « Et une fois ce podcast « terminé » pense-tu aborder d’autres cultures sur le même schéma ? J’avance un peu mais je suis réellement impressionné par ta démarche et ta motivation, ce serait tellement incroyable d’avoir la même structure pour les francs ou les anglo-saxons par exemple qui sont souvent assez peu mis en avant ^^ »
Merci Kurtis pour ton message et cette nouvelle question ! Eh bien j’ai déjà répondu à cette question juste avant, mais j’en profite pour annoncer que ce que tu recherches existe en fait déjà ! Il existe déjà un podcast sur les Anglo-Saxons et un podcast sur les Francs. Et ils sont excellents !
Je fais un peu de teasing, ou plutôt pour ne pas utiliser d’anglicisme, je vais utiliser la suggestion de l’Académie français, je fais un peu d’aguiche. Car avant de vous recommander ces podcasts, je vais vous expliquer comment m’est venue l’idée de créer le podcast dans ce format.
En 2020, j’ai découvert le podcast Viking Age Podcast, qui m’a littéralement passionné. Dans ce podcast en anglais, Lee Accomando relate une histoire chronologique de la période viking. À partir de 2016, il produit 70 épisodes, avant d’arrêter son projet en 2019. Laissé sur ma faim, j’ai ensuite commencé à écouter The British History Podcast de Jamie Jeffers, qui avait été cité par Lee comme une de ses inspirations. Plusieurs centaines d’épisodes après, j’écoute assidûment Jamie me raconter l’histoire passionnante des Brittons, Saxons, Anglais, Danois et Normands ayant foulé la Grande Bretagne. Donc pour l’histoire des Anglo-Saxons, c’est LA référence.
J’ai ainsi découvert un genre complet de podcast : les podcasts chronologiques d’Histoire, produits par des indépendants. J’ai réalisé qu’il en existait des dizaines, sur des sujets très variés : histoire de Rome, histoire des pirates, Préhistoire, histoire de l’Allemagne et même histoire de France… Leur point commun ? Ils sont tous en anglais. Mike Duncan a lancé The History of Rome en 2007 et a été suivi par de nombreux autres. Mais ce genre reste quasi inconnu dans la francophonie. Nous avons bien des podcasts d’histoire, beaucoup même, produits par des radios, des agences ou des indépendants. Mais tous se concentrent sur des événements distincts, ou font éventuellement des séries de quelques épisodes sur un thème. Au moment de lancer La Dent Bleue, je n’avais trouvé aucun podcast en français qui racontait l’histoire chronologique d’un thème, sur la durée, du début à la fin. De mon côté, si j’ai écouté ces podcasts chronologiques en anglais, c’est avant tout parce que je n’en avais pas trouvé en français. Après la découverte de ces podcasts, l’envie avait grandi chaque jour en moi de raconter dans un podcast l’histoire des vikings. Et c’est maintenant chose faite !
J’explique tout ça dans la page « Le projet » du site ladentbleue.fr que j’ai écrite au lancement du podcast. J’en profite pour vous recommander d’aller faire un tour sur le site, vous y trouverez notamment une bibliographie avec des conseils de lecture et pour chaque épisode, le script complet avec les sources détaillées, à la page près pour vérifier les informations ou approfondir vos recherches.
Et donc pour les amateurs d’Histoire, il existe des podcasts racontant chronologiquement l’histoire d’autres peuples. Il en existe des dizaines, mais… malheureusement, ils sont en anglais, donc ça ne s’adresse qu’à ceux qui ont un bon niveau de compréhension dans cette langue.
MAIS ! Ce n’est pas tout ! Après le lancement de La Dent Bleue, j’ai découvert un excellent podcast en français : L’Histoire des Francs et des Mérovingiens, produit par Xavier et Romain. Une belle qualité de narration, de l’humour avec le duo : c’est une pépite que je vous recommande ! Eux aussi ont Jamie de The British History Podcast comme référence. Ils sont partis des premiers écrits de Tacite sur les Germains et ils viennent de sortir leur épisode 63 qui raconte le baptême très médiatisé de la superstar Clovis. Il est possible qu’il y ait une collaboration entre nos deux podcasts pour parler d’un sujet connexe entre les germains du Nord que sont mes vikings et les germains de l’Ouest que sont leurs Francs. Affaire à suivre !
Satisfactions et points négatifs
Merci encore pour toutes ces questions, cela m’a fait plaisir de voir que vous étiez motivés par ce projet de FAQ. Pour terminer, je voulais vous parler de mes satisfactions et aussi des petits points négatifs. Pour commencer par un point très positif, je prends beaucoup de plaisir dans tout ce projet et je suis vraiment très comblé de l’avoir lancé. Et notamment parce que vous êtes de plus en plus nombreux à écouter La Dent Bleue ! Au moment où j’enregistre, il y a eu plus de 16 000 écoutes depuis le lancement du projet, il y a un peu plus d’un an ! Je trouve ça vraiment génial, surtout pour un projet aussi « niche » et récent. Et les chiffres de ces derniers mois ont vraiment explosé. Depuis le lancement du podcast, on était entre 500 et 1000 écoutes par mois. Mais depuis trois mois, cela ne fait qu’augmenter et on a atteint les 3500 écoutes le mois dernier. Donc c’est vraiment top, merci à vous d’être au rendez-vous ! Je ne fais pas ce projet pour des chiffres d’audience, mais si personne n’écoutait, ça serait juste moi en train de parler tout seul dans mon micro pour personne, ce qui serait un peu triste, avouons-le.
Une autre source de satisfaction est le fait que globalement, vous écoutiez les épisodes dans l’ordre. Je vois ça car le classement des épisodes en nombre de lecture suit l’ordre de sortie. C’est une satisfaction car c’est vraiment tout le concept de cette émission : raconter une histoire de façon chronologique, épisode par épisode. Et souvent il y a plus d’une centaine d’écoute le jour de la sortie de l’épisode, donc c’est hyper gratifiant, après avoir autant bossé sur un épisode de voir que certains d’entre vous sont tout de suite au rendez-vous ! D’ailleurs, n’hésitez pas à vous abonner au podcast sur votre application de podcast préférée, c’est le meilleur moyen pour être tenu au courant des sorties.
Dans les autres points positifs, je reçois aussi des commentaires sur les réseaux sociaux et sur ladentbleue.fr, des messages privés et des mails. Et vous ne pouvez pas savoir à quel point ça me fait plaisir ! Les chiffres d’audience qui montent, c’est top et j’essaie de m’imaginer chacun de vous en train d’écouter les épisodes, mais ça reste très abstrait. Alors qu’un petit message ou commentaire, c’est tout de suite très concret et ça donne vraiment du sens à tout ça. Donc merci à vous pour vos commentaires !
Maintenant en ce qui concerne les points négatifs, les petites déceptions en quelque sorte. Il n’y en a pas beaucoup, mais cela concerne principalement les réseaux sociaux. Entre les épisodes, j’essaie de partager sur Instagram, Facebook et Youtube du contenu, des cartes, des illustrations pour donner un peu de visuel à ce format audio que j’ai choisi. Des quizz sur les épisodes aussi. Mais pour l’instant, il n’y a pas énormément d’abonnés sur ces réseaux et pas énormément d’engagement sur les publications.
Et mon regret principal, c’est de ne pas avoir réussi pour l’instant à construire une petite communauté autour de La Dent Bleue, qui rassemblerait les auditeurs du podcast et donc des amateurs de l’histoire de la Scandinavie. Ce projet, je l’articule autour de la communauté WhatsApp de La Dent Bleue. Elle est composée d’un groupe d’annonce dans lequel je partage quelques publications et de quelques groupes ouverts pensés comme des espaces d’échanges autour du thème de l’Histoire, des vikings ou de la réaction aux épisodes. Je n’avais pas forcément envie de partir sur un groupe Reddit, Discord ou Facebook, donc j’ai tenté cet espace un peu différent, mais pour l’instant, ça ne prend pas spécialement. Je continue encore à l’animer pour l’instant et on verra pour la suite.
En tout cas, si vous êtes intéressés pour rejoindre la communauté WhatsApp ou vous abonnez sur les réseaux sociaux, les liens sont dans la description.
Et c’est tout pour cette FAQ, un format différent aujourd’hui dans lequel je voulais engager une discussion avec vous, les auditeurs !
C’était Maxime Courtoison pour le podcast La Dent Bleue, l’histoire des vikings. Merci pour votre écoute et à bientôt !
Bibliographie
Anthony, D. W. (2007). The Horse, the wheel and language : How bronze-age riders from the eurasian steppes shaped the modern world. Princeton University Press.
Barber, E. J. W. (1991). Prehistoric Textiles : The Development of Cloth in the Neolithic and Bronze Ages with Special Reference to the Aegean. Princeton University Press.
Helmer, D. A. du texte. (1992). La domestication des animaux par les hommes préhistoriques / Daniel Helmer
Olander, T. (2019). The Indo-European homeland : Introducing the problem. In B. A. Olsen, T. Olander, & K. Kristiansen, Tracing the Indo-Europeans : New evidence from archaeology and historical linguistics (p. 7‑34). Oxbow Books.
Les épisodes précédents sont cités comme sources également : vous pouvez y consulter les références et la bibliographie.
Crédits
Musique de générique : « Heavy Interlude » de Kevin MacLeod. ( http://incompetech.com/music/royalty-free/index.html?isrc=USUAN1100515 ). Licence Creative Commons Attribution 4.0.
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